
Anne-Sophie et Richard Levallois
UNE AFFAIRE DE FAMILLE…
Le grand-père de Richard a été étalonnier dans les chevaux de trait. Avec le directeur du haras de Saint-Lô de l’époque ils ont amorcé la transformation des chevaux de travail vers plus de légèreté en croisant les cobs légers et les trotteurs avec les pur-sang ce qui a finalement abouti, après la guerre, à l’apparition du cheval de sport. Le père de Richard a été avant tout un marchand, à son époque les agriculteurs vendaient leurs chevaux de ferme pour acheter des tracteurs. Lui avait une passion pour l’équitation, il partait à cheval pour participer aux concours organisés par les sociétés hippiques rurales.

Germain Levallois et LE TOT DE SEMILLY
La passion de l’élevage est venue avec Richard – le haras à Couvains a été acheté à cet effet en 89. Il a commencé avec ses trois bonnes juments de concours et ensuite, avec le développement de la technique du transfert d’embryons, il a eu accès à la très bonne génétique.

Haras de Couvains
LA REVOLUTION TECHNIQUE DE L’ELEVAGE A DEBUTE EN NORMANDIE
Le Haras de Semilly a été le premier, avec la famille Pignolet, à développer l’utilisation et la commercialisation de la technique du transfert d’embryons sur les chevaux – ils ont travaillé avec la coopérative agricole qui le pratiquait sur les bovins. Les chercheurs de l’INRA ont fait leurs tests en parallèle mais c’est vraiment ici que cette pratique a été mise à la disposition des éleveurs et développée progressivement. Le transfert d’embryons équin est devenu aujourd’hui monnaie courante dans toute l’Europe et dans le monde.

ARTISTE DE L’ABBAYE présenté par Richard
EN ELEVAGE, ON PRIVILEGIE LA NATURE AUX PIQURES
Depuis plusieurs années le Haras de Semilly représente le plus grand centre français en matière de reproduction équine. En moyenne 700 juments passent par le haras pendant la saison de monte.

« On est souvent appelé à la fin de la saison « en dernier recours ». On a un très bon taux de réussite de remplissage et heureusement, car avec tout le mal qu’on se donne !… Le secret de la réussite c’est tout simplement le respect de la nature. Les juments arrivent souvent déréglées, plus rien ne marche normalement. Les causes sont multiples : certaines n’ont pas une vie normale pour une poulinière – confinées en boxe, avec des couvertures, sans contact avec les congénères. D’autres ont été déréglées par trop d’injections d’hormones pour déclencher les chaleurs, pour précipiter l’ovulation … Ca peut marcher au début, mais après on dérègle tout. Nous on passe notre temps à les reprogrammer naturellement. On les met à l’herbe – c’est un élément très important avec le soleil car ils apportent beaucoup de vitamines nécessaires – et dans un troupeau où elles vont mieux se cycler mutuellement. On les fait souffler par un poney – alors qu’en général elles ne voient pas l’ombre d’un étalon. On les observe et on les contrôle régulièrement. En fin de cycle, le rythme des échographies s’accélère pour ne pas rater l’ovulation : tous les jours et tard le soir si nécessaire avec l’aide d’une bonne équipe de vétérinaires et on insémine au plus près de l’ovulation en essayant d’avoir le moins possible recours aux piqures d’hormones. C’est beaucoup de travail car avec certaines juments cela peut prendre beaucoup de temps, mais il ne faut pas être pressé si on veut de bons résultats, surtout lorsque l’on nous demande d’inséminer avec une seule paillette ! Avec les étalons fertiles comme Diamant ce n’est pas un problème mais avec certains autres c’est beaucoup plus compliqué ! On a remarqué également que les fils des étalons fertiles sont souvent fertiles également, c’est une qualité qui se transmet. Les techniques de congélation sont aussi très importantes – avec Eurogen, nous avons développé une excellente technique qui nous permet de gagner des points en qualité de semence post-décongélation. »

ROCCK’N ROLL SEMILLY fils de DIAMANT photo Delaroque
LE MENTAL AVANT TOUT
On fait naître une trentaine de poulains par an ce qui n’est pas énorme. Certains éleveurs français en font naître le double, sans parler de Paul Schockemölhe qui en fait naître des centaines. Nous ne sommes donc pas un gros élevage en quantité de production. Nous essayons de miser davantage sur la qualité.

LE TOT DE SEMILLY le chef de race, photo Monneron
Pour les croisements, le critère de qualité qui pour nous est le plus important et avec lequel on a démarré avec note premier étalon, Le Tot de Semilly, c’est le mental. Même le meilleur cheval avec toute la force et la technique, s’il n’a pas envie de bien faire, il ne fera rien. Il faut des chevaux courageux et c’est pour cela que les souches normandes sont appréciées, car à leurs bases il y a des chevaux de travail et les paysans ne gardaient que des chevaux de labour qui acceptaient des efforts très durs. Les SF sont donc réputés comme faciles et courageux et à ce titre appréciés par les étrangers.

LE TOT DE SEMILLY et Eric Levallois
A l’époque on était à peu près les seuls à croire en Le Tot. Les éleveurs lui préféraient Narcos, qu’il fallait réserver un an à l’avance. Avec du recul, on a eu raison de croire en Le Tot qui, avec sa force, son bon équilibre, son respect naturel et sa grande facilité s’est révélé, malgré un modèle que certains trouvaient trop massif, comme un véritable chef de race.

LE TOT – modèle en puissance et en équilibre

LE TOT à La Baule photo F.Paplard
La race a évolué très vite, maintenant on recherche des chevaux modernes, légers, avec beaucoup d’énergie, une bonne technique, respectueux. Et le respect c’est inné. Aujourd’hui, même en épreuves amateur, si vous avez des chevaux lents et lourds, ça ne passe plus. Les épreuves sont de plus en plus rapides, les obstacles de plus en plus légers, il faut donc des chevaux électriques qui réagissent à la moindre sollicitation. Mais il est vrai que l’excès de cette réactivité fait qu’ils peuvent se faire facilement peur et s’arrêter net ou être trop difficiles à contrôler. Le juste milieu est donc très délicat à trouver et c’est pour cela que les chevaux d’exception sont tellement rares. »
DIAMANT DE SEMILLY UN EXTRATERRESTRE
Comme Diamant justement.

« Comment dire… C’était comme une voiture avec une vitesse en plus. Il n’a jamais fait un refus de sa vie. Même dans les pires abords, il n’a jamais été dans le rouge, tellement il avait de la force et un super mental.

DIAMANT et Eric Levallois JEM de Jerez, photo F.Paplard
On se rappelle toujours la vidéo des JEM à Jerez en 2002 quand il est devenu le Champion du Monde. Il y a avait une rivière puis un très gros oxer avec un contrat de foulées très délicat. Il est arrivé complètement dans le pied de l’oxer et normalement, 95% des chevaux se seraient arrêtés ou écrasés dedans. Mais lui non : il a sauté et à tout fait pour ne pas toucher, alors que c’était infaisable.

DIAMANT et Eric au JEM photo F. Paplard
Il transmet ses qualités à sa production et ce n’est pas un hasard s’il a été le meilleur étalon du monde pendant 2 années de suite et encore deuxième cette année. Vu la régularité de sa production et la qualité de ses nouvelles générations qui arrivent, il va sans doute parmi les meilleurs pendant plusieurs années encore. En plus on a la chance qu’il soit toujours aussi fertile. Il est vraiment un phénomène surnaturel à tous points de vue !

DIAMANT et Eric à Aix-la-Chapelle photo F. Paplard
Certains médisants le disaient méchant sans savoir qu’il était orphelin et élevé au biberon. S’il avait eu une mère, il aurait été comme un cheval normal et très gentil comme son père l’était car il transmet lui aussi un excellent caractère à ses produits.

DIAMANT à la Baule photo R.Costabadie
Il a été nourri par Richard et un employé de l’époque – toutes les deux heures jour et nuit. Il se promenait en liberté dans la cour et venait à la fenêtre pour prendre son biberon. Aujourd’hui on ne le referait plus. Dans un cas de malheur comme ça il faut absolument trouver une mère de substitution. Un poulain élevé seul n’a pas de codes, pas d’éducation et devient rapidement ingérable. On voit des cas bien pire que Diamant alors qu’il est étalon !

DIAMANT à Donaueschigen photo R. Costabadie
Malgré sa triple opération de coliques en 2008, Diamant a bien récupéré et a une vie très agréable. Il va tous les jours au paddock (il en a 10 à sa disposition !) et a un repas en plus dans la journée et le soir, au boxe, comme il ne faut pas qu’il mange de la paille ou des copeaux, on lui a fait un matelas en caoutchouc avec de l’air en dessous. Un régime 4* !

L’étalon et son cavalier…
DES ETALONS EN OFFRE PLETHORIQUE ET LES ELEVEURS DE PLUS EN PLUS PERDUS
Les catalogues des étalons sont de plus en plus beaux et de plus en plus fournis mais il est de plus en plus difficile de faire de nouveaux croisements et de faire percer de nouveaux étalons. C’est assez inquiétant pour l’avenir de l’élevage français. A l’étranger, les étalons de 2 et 3 ans agréés saillissent beaucoup plus qu’en France et c’est grâce à ce bon testage sur descendance que l’on se rend compte des qualités de leur production et qu’ils peuvent espérer percer. Les jeunes étalons français saillissent 20-40 juments ce qui n’est pas significatif et les éleveurs préfèrent les étalons étrangers à la mode. Heureusement qu’à l’inverse, les étrangers cherchent le SF originel ! En concours, le sang français est aussi bien apprécié.

QUEBRACHO SEMILLY et Katharina Offel CSIO Dublin
De notre côté on relativise les modes et l’on suit notre idée pour ce qui concerne notre propre élevage, mais on est d’accord que pour faire sortir un jeune étalon du lot, il faut bien créer une mode, une envie.

QUEBRACHO à Fontainebleau 7ans
L’ouverture à l’étranger est une bonne chose si vous importez le top et si vous le mélangez avec le sang français. Le problème, c’est que, quand ils sont très bons on a du mal à les avoir en France, mais si vous importez ce dont ils ne veulent plus, on risque de dégrader la race. Or, la majorité des éleveurs ne savent pas quelle est la véritable qualité de tous ces étalons importés. S’ils produisent des poulains moyens, difficilement vendables, ils vont s’écœurer et arrêter.

ROCK’N ROLL SEMILLY le Champion des 6 ans à Fontainebleau

ROCK’N ROLL SEMILLY et Marlon Modolo Zanotelli à La Baule Coupe des Nations
Le Salon des Etalons de Saint-Lô est une magnifique vitrine. C’est le plus grand salon en France et en Europe. Il y a beaucoup de visiteurs étrangers. Le site s’y prête parfaitement et le salon est très bien organisé, c’est donc un événement majeur pour tous les professionnels et les passionnés de l’élevage. Ce qui me dérange c’est la façon dont les étalonniers présentent leurs chevaux. C’est bien de savoir présenter et de vanter les mérites de chaque étalon, c’est convivial aussi, mais si on dit n’importe quoi ça fausse la donne et mentir aux éleveurs pour vendre les saillies ça me dérange vraiment.

ROCK’N ROLL SEMILLY et Marlon Madolo Zanotelli Longines Cup of the City of Barcelona
ANDIAMO VERS L’AVENIR

ANDIAMO SEMILLY – un modèle sport moderne
Andiamo Semilly est celui qui se détache le plus dans notre piquet des jeunes. Il présente les qualités de Diamant mais en plus moderne, plus sport. Sa lignée maternelle ramène le sang de Rantzau, ce qui est un très bon atout. Il se transcende sur la piste. C’est un cheval facile, courageux et intelligent : un cheval de sport par excellence.

ANDIAMO SEMILLY avec O.Martin 6 ans à Fontainebleau 2016

ANDIAMO SEMILLY avec O.Martin 7 ans à Fontainebleau 2017
Et il y a tous les autres, évidemment auxquels on croit.

ARTISTE DE L’ABBAYE 6 ans avec O.Martin Masters à Saint-Lô photo Pixels Event

AWAY SEMILLY présenté par son naisseur

AWAY SEMILLY et O.Martin à Fontainebleau 2017 photo Louzier
Captain Semilly avec son beau modèle, sa force, sa souplesse et beaucoup de charisme. Pour l’instant, il a du mal à se concentrer en concours car il a énormément de sang et la monte lui tourne un peu la tête. Il faut lui laisser le temps. Je pense toujours à Papillon Rouge qui n’a jamais rien fait jusqu’à 8 ans et qui s’est révéler ensuite. Dans notre métier il faut savoir s’adapter à chaque cheval et aussi être patient…. »

CAPTAIN SEMILLY – un modèle séduisant

CAPTAIN SEMILLY et O.Martin à Fontainebleau 2016